Retrouvez Stéphanie Duthilleul Vasen, Directrice de la practice Finance au sein d’Oasys dans ce dossier de Daf Mag.

 

Cabinet d’audit, contrôle de gestion dans un grand groupe puis direction financière d’une plus petite structure : le schéma pour devenir Daf est souvent des plus classiques. Mais après ? Comment bien gérer sa carrière de Daf ? Quelles compétences acquérir et comment ? Quelles missions, entreprises et secteurs choisir ? Autant de questions auxquelles il est nécessaire de répondre pour bien gérer sa carrière et rester employable.

1. Quelles compétences pour les Daf aujourd’hui ?

Il est bien loin le temps où le Daf n’était que le gardien du temple. Cela fait plusieurs années que l’on parle d’un Daf business partner, à la fois bras droit du dg et fonction support des opérationnels. A cela s’ajoutent de nouvelles attentes, liées à la digitalisation des entreprises mais aussi à l’incertitude ambiante.

Prendre en main sa carrière c’est avant tout connaître les compétences attendues par le marché. Or, du côté des Daf, les évolutions sont de mises : après avoir été recruté pour ses compétences techniques, le Daf est aujourd’hui attendu sur des sujets plus opérationnels et stratégiques. A cela s’ajoutent des dimensions nouvelles comme la digitalisation et la RSE. Autant de compétences qu’il s’agit non seulement d’identifier mais aussi d’acquérir pour s’assurer de rester employable.

Un périmètre qui s’élargit

Premier élément à avoir en tête : les attentes vis à vis des Daf sont de plus en plus exigeantes« La complexité réside dans le fait qu’il doit s’adapter à un métier de plus en plus multi tâches : en plus de ses tâches courantes, le Daf doit être business partner, prendre en charge la transformation digitale, accompagner les négociations liées aux financements ou s’occuper des dossiers de M&A…, énumère Aude Boudaud, directrice associée en charge du département Finance & IT chez Robert Walters. A cela s’ajoutent des compétences managériales pour déléguer, donner du sens dans un contexte de flexibilité des modes de travail, ajoutant de la pression supplémentaire ». Le Daf doit donc être capable de mener de nombreux sujets de front, y compris certains qui ne sont pas naturellement dans son scope. Axel de Schietere, partner Finance and Corporate Officers chez Heidrick & Struggles, raconte ainsi que ses clients lui demandent de plus en plus souvent que le Daf soit en capacité d’être un levier de performance pour les opérationnels.

Les nouvelles tendances de société affectent aussi les directions financières. A l’image de la RSE ou de la digitalisation. Ludovic Bessière, business director Hays Finance & Comptabilité et responsable du club carrière et évolution de la DFCG Ile-de-France, remarque par exemple qu’il est attendu des Daf qu’ils orchestrent la transformation des SI de l’entreprise« Avoir accompagnée un changement d’ERP est une compétence très recherchée », abonde Cécile Vignial, principal au sein du cabinet Segalen+associés. Stéphanie Duthilleul Vasen, directrice de la practice finance chez Oasys, dit quant à elle commencer à voir apparaître des postes de directeurs de la transformation financière, qui prennent en charge les sujets de digitalisation et de robotisation. Pour elle, c’est cependant un autre grand sujet qui émerge au sein des directions financières : celui de la RSE. « Ce sujet est poussé par le régulateur, les consommateurs, les collaborateurs. Cela peut représenter pour le Daf l’opportunité de sortir du rôle de gardien du temple », mesure-t-elle. Les CFO doivent notamment être en mesure de comprendre les critères ESG des agences de notation et des investisseurs.

Ludovic Bessière constate cependant que les profils de Daf recherchés par ses clients n’ont pas énormément évolués depuis 20 ans. « Il est toujours demandé de fortes compétences en comptabilité et en contrôle de gestion afin de bien comprendre les rouages financiers mais aussi piloter la performance et réaliser des prévisions ». Il est rejoint sur ce point par Stéphanie Duthilleul Vasen : « On entend beaucoup parler de digitalisation, big data, transition environnementale et durable… Mais les attentes des dg restent les mêmes : qu’ils assurent leurs missions régaliennes, c’est-à-dire qu’ils sécurisent la pérennité de l’entreprise, qu’ils optimisent la marge et le cash-flow, qu’ils s’occupent du haut de bilan, de la conformité, des financements, etc… La base du métier ne doit pas être occultée par les sujets à la mode ». Elle remarque un recentrage du rôle de Daf sur son socle de base, notamment durant la crise du Covid.

Agilité et pédagogie

La crise du Covid a d’ailleurs généré de nouvelles attentes vis-à-vis des Daf : alors qu’ils avaient le souci de l’exactitude, ils doivent aujourd’hui composer avec l’incertitude« Les Daf doivent être en mesure de gérer l’imprécision des chiffres dus à des imprévus ou des aléas. Ce qui n’est pas facile pour eux », note Emmanuel Dufour, partner chez Segalen+associés. Le nouveau Daf se doit donc d’être agile, une des nombreuses “soft skills” qu’il doit posséder. « 60 à 75% des critères de recherche sont des « soft skills ». Le comportement est en effet primordial », rapporte Ludovic Bessière. Il cite notamment, au-delà de l’agilité, des qualités de dynamisme, de communication, de curiosité ou encore d’écoute. « Le Daf doit être à l’écoute du terrain et capable de discuter des sujets stratégiques avec les BUs, les régions, et la direction générale », rapporte Cécile Vignial. Une capacité d’écoute qui va de pair avec une réelle ouverture. “Le Daf est aujourd’hui avenant, ouvert, en relation avec des personnes très différentes », avance Romain Le Levé, manager chez Fed Finance Lyon. Cette ouverture permet non seulement de se tenir au courant de ce qui se passe sur le terrain mais aussi de faire passer des messages auprès des parties prenantes, internes et externes. Le Daf doit donc aussi être un bon communicant. « Les aptitudes pédagogiques, la capacité à expliciter les états financiers en interne comme en externe sont clés pour mener les changements », relève Cécile Vignial.

Acquérir de nouvelles compétences par l’ouverture

Une des « soft skills » recherchée est aussi la curiosité, pour se tenir au courant de ce qui se passe aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’entreprise. Une curiosité qui permet aussi au Daf de se former, d’acquérir de nouvelles compétences. Charles Legrand, Daf de Culligan, raconte avoir acquis des compétences aux côtés de personnes inspirantes. « Des managers m’ont appris des éléments en BI, finance mais aussi en qualités comportementales. Des gens parfois très différents de moi qui avaient une approche différente, une compréhension autre des problématiques ». Cécile Salin Echalier, CFO conseille ainsi d’embaucher des gens plus brillants que soi, pour apprendre à leurs côtés.

La curiosité ne suffit parfois pas pour acquérir les compétences sus-mentionnées. Certains Daf décident ainsi de suivre un MBA : Charles Legrand s’est récemment lancé dans cette aventure. « J’ai été formé pour apprendre à travailler dans un environnement il y a 25 ans, je souhaitais remettre à jour ma formation. Par ailleurs, j’étais en situation de directeur général sur certaines filiales et j’avais besoin d’éléments théoriques en marketing et en stratégie pour renforcer mes compétences », explique-t-il. Il remarque déjà les répercussions de cette formation sur sa carrière : il fut par exemple invité à faire partie d’un groupe de travail pour la mise en place de la stratégie ESG de son entreprise.

Passer par la case MBA n’est cependant pas nécessaire pour acquérir de nouvelles compétences. On peut aussi suivre des formations plus courtes, en présentiel ou même en ligne mais également assister à des conférences, des webinaires, lire des ouvrages… L’essentiel est de rester ouvert, curieux. « Il est important de se tenir au courant des dernières évolutions, des nouvelles normes comptables par exemple », conseille Emmanuel Dufour. Pour Sébastien Denis, practice manager chez Michael Page, l’expérience professionnelle ne suffit en effet pas à rester frais culturellement : “Il faut chercher à développer ses compétences par soi-même”, souligne-t-il. Stéphanie Duthilleul Vasen préconise de se former tout au long de sa vie : ” Cela doit faire partie de sa feuille de route en tant que dirigeant car c’est ainsi qu’on reste créatif et innovant ». Elle conseille aussi de suivre des séances de coaching. « Cela peut être intéressant pour incarner une posture de dirigeant, travailler sur l’intelligence émotionnelle, améliorer sa capacité à déléguer ou encore se concentrer sur l’essentiel ».

On peut aussi se former grâce à son réseau. Cécile Salin Echalier cite ainsi le dernier événement 100% Finance de Daf Magazine qui lui a donné matière à réflexion. Fabien Dawidowicz, qui vient de quitter son poste de Daf chez Spendesk pour d’autres aventures en tant que CFO de Yespark, dit progresser en échangeant avec d’autres Daf afin d’avancer ensemble. « Cela permet de ne pas rater un virage ». Mêmes considérations du côté de Louis de Miscault : à la tête d’une Daf élargie (CFO + DRH + directeur juridique) chez Cooptalis depuis quelques mois, il avait rencontré d’autres Daf mais aussi des fondsdes techniciens après avoir quitté son précédent poste afin de « réseauter ». « Cela m’a révélé ce que ces ouvertures pouvaient apporter, c’est très enrichissant », indique-t-il, disant qu’il va désormais chercher à réserver du temps pour cela.

Et pour acquérir des soft skills ? Il existe aussi des formations sur des sujets comme “convaincre et persuader” ou encore “travailler en équipe”. « J’ai pu suivre des formations managériales mais il est difficile de faire un apprentissage accéléré de soft skills telles que l’interaction avec les autres ou encore la prise de décision. Ces compétences de savoir-être viennent plus avec les années d’expérience, les responsabilités que l’on endosse », juge Arnaud Degreve, group financial controller de Clasquin. Et cela ne vaut pas que pour les soft skills : « Se former de manière uniquement théorique sans mise en oeuvre pratique ne fonctionne pas », met en garde Aude Boudaud. Une vision partagée par Axel de Schietere qui pense que la meilleure façon d’acquérir des compétences c’est l’expérience« Il faut être au bon endroit au bon moment et tenir la barre quand ces événements arrivent ». Cécile Salin Echalier dit ainsi avoir acquis des compétences à chacune de ses expériences« J’ai travaillé dans le domaine industriel, j’ai géré plusieurs devises, sur les contrats… J’ai aussi beaucoup travaillé sur les sujets de RSE, notamment au niveau des politiques sociales de nos prestataires mais aussi les achats de matière première ou encore l’éco-conception des sites Internet ». Aude Boudaud conseille de saisir des opportunités de nouveaux projets dans son entreprise afin de les mener et de se former en même temps. Un mélange d’expérience et de formation : voilà la clé pour acquérir les compétences attendues.

 

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