Article écrit par David Marmo, Directeur associé de Oasys & Cie, dans Economie Matin.
Les 18 et 19 novembre 2022 se sont tenus les 20e Entretiens de Valpré sur le thème de l’économie souhaitable. Le premier réflexe qui nous vient, en tant que dirigeant, est de se questionner sur son propre rôle et sa contribution personnelle à cette économie souhaitable. Cette question a été expressément abordée lors des groupes de travail des fameux entretiens de Valpré.
Une autre réflexion s’offre ensuite à nous assez rapidement, à une échelle plus personnelle : comment définir et s’approcher de l’entreprise souhaitable ? Pour accompagner un certain nombre de dirigeants dans ces questionnements et ces réflexions, nous pouvons constater que définir cette entreprise souhaitable et souhaitée n’est pas une mince affaire. Mais à bien y regarder, cette première étape n’est peut-être pas la plus complexe. En effet, lorsque les contours de l’entreprise souhaitée sont définis, un certain nombre de défis se présentent à lui. Et nous pouvons en énumérer pas moins de sept !
Défi n°1 : Synthétiser et vulgariser
Au fond, la mission attendue d’un dirigeant n’est-elle pas de préparer l’avenir, et donc d’imaginer le ou les futurs possibles ? Ce travail individuel, bien qu’accompagné d’experts ou de collègues avertis, doit servir de première brique à une mission un peu plus large : faire comprendre et expliquer son projet aux autres. Dans sa propre tête, tout est souvent très clair : les différents éléments du projet sont reliés entre eux, font échos à des expériences passées et les différentes hypothèses ont été pesées et analysées. Mais ce qui est dans notre tête est bien souvent abstrait, imagé, impalpable, incomplet. Le premier défi consiste alors à extraire de son mental la complexité de ce projet à multiples ramifications pour en faire un objet simple et compréhensible par d’autres. Il doit alors traduire des pensées, des sentiments, des intuitions en un texte, une note de réflexion, un diaporama PowerPoint ou tout autre support de communication qui permettra de verbaliser sa pensée. Passer de la pensée à l’écrit est déjà une première épreuve.
Défi n°2 : Organiser le pilotage
Le cœur du projet (son sens, ses grandes ambitions, ses principaux objectifs chiffrés) est souvent bien identifié par le Dirigeant. Imaginer et projeter l’entreprise souhaiter fait naturellement partie de son cœur de métier. En revanche, un certain nombre d’aspects nécessitent d’être définis avant même de partager ce contenu. Ces questions pourraient être résumées en une seul mot clé : le comment. Sur qui vais-je m’appuyer ? Comment pourraient être réparties les grandes étapes et comment coordonner les différents intervenants ? Un beau projet « sur le papier » nécessite de prendre vie sur le terrain, faute de quoi le dirigeant aura surtout construit une belle plaquette. Organiser et planifier le pilotage est une brique incontournable de la construction même d’un projet, et cela avant même d’avoir entamé les étapes suivantes. Cette partie doit être considérée comme une part intégrante du projet dès sa construction.
Défi n°3 : Convaincre et embarquer
Dans sa fable « Alerte sur la Banquise », qui reprend les grandes étapes de l’accompagnement du changement, John Kotter insiste sur un point : une des compétences clés du dirigeant est de savoir embarquer les bonnes personnes dans son projet. Avoir raison seul n’a jamais mené très loin. Il est donc nécessaire d’embarquer dans un premier temps un cercle rapproché pour présenter son projet et aiguiser ses arguments. Ce premier cercle, identifié dès la construction, est un relais incontournable. Sans leur « consentement » et leur engagement, tout effort sera vain, car ce premier échelon managérial constitue une courroie essentielle pour la réussite.
Défi n°4 : Accueillir les suggestions et les modifications
En lien direct avec le 3e défi, l’accueil de TOUTES les suggestions est un exercice ardu. Accueillir ne veut pas dire intégrer, et les remarques du premier cercle doivent permettre au dirigeant d’identifier les éléments à faire évoluer, de parfaire les argumentaires ou de compléter les zones d’ombres de sa première esquisse. De plus, le dirigeant, dans ces premiers exercices de partage, doit surtout avoir pour objectif de transformer « son » projet en « notre » projet qui inclue les remarques, commentaires et améliorations suggérées par ses proches. En incluant les autres dans son projet originel, il ne l’affaiblit pas mais au contraire, il le renforce, à la fois par la qualité bonifiée de son contenu mais aussi par le nombre de sponsors prêts à défendre et porter le projet. En résumé, le dirigeant doit développer une qualité qui fait malheureusement souvent défaut : l’écoute réelle, l’écoute active, en éteignant sa radio interne qui lui suggère des arguments et des réponses toutes faites mais au contraire une écoute qui permet au dirigeant de se poser la question suivante : si l’on me dit cela, en quoi cela peut-il servir le projet ? Refuser d’entendre un argument à ce stade revient à se couper potentiellement d’un allié futur.
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